Autoroute A51 : Corinne Bernard propose au ministre des solutions alternatives
Corinne Bernard vient d’écrire à Frédéric Cuvillier, ministre des transports, afin de s’étonner de ce que l’achèvement de l’autoroute A51 soit examiné dans le cadre du «schéma national de mobilité durable».
Monsieur le Ministre,
Conseillère régionale depuis 2010, je vis à Mens, village du Trièves, depuis août 2004 et tiens à vous faire part de mon avis sur le débat en cours sur les priorités dans les infrastructures de transports. En effet j’ai appris tout récemment que l’autoroute A51 ferait partie, contrairement à tout ce qui était dit publiquement, des projets examinés par la commission « mobilité 21 » que vous avez mis en place. C’est pour moi un premier motif d’étonnement.
Cela me renvoie à quelques souvenirs du débat public de 2005 sur le projet d’autoroute A51 Grenoble Sisteron. J’ai vu personnellement l’impact du lobbying, avec des dizaines de cars affrétés par les chambres consulaires pour emmener « en campagne » les décideurs-financeurs, le déluge de communications et déclarations de nombreux élus et décideurs. J’ai aussi entendu beaucoup de témoignages d’inquiétudes et d’incompréhensions de la part des populations directement concernées.
Pourtant la Déclaration d’Utilité Publique a été signée et les travaux ont été faits sur le tronçon Coynelle-col du Fau. Nous avons désormais un des barreaux les plus chers de France: 10,5 kilomètres, un viaduc, deux aires, trois tunnels pour 200 millions d’euros et un péage à 3,20 euros actuellement.
En 2007, l’inauguration triomphale du secteur de l’A51 de Saint Martin de la Cluze au Col du Fau m’a semblé indécente. En plein débat sur le réchauffement climatique et sur la raréfaction du pétrole, se réjouir de cet ouvrage extrêmement coûteux qui ne résolvait aucun des problèmes de circulation et d’aménagement du territoire posés au 21e siècle était atterrant.
Le projet disparut de l’actualité mais la frustration de certains, « l’enclavement » d’autres, et l’acharnement médiatique le remirent au goût du jour lors des élections législatives de 2012.
Comme en 2007, il est tout aussi inutile, encore plus coûteux, et surtout ne répond pas aux problématiques actuelles :
– l’achèvement de l’A51 pénaliserait le développement des transports collectifs, car l’argent public ne se dépense pas deux fois, alors que les décideurs devraient anticiper sur l’augmentation du prix du pétrole et le réchauffement climatique.
– l’achèvement de l’A51 condamnerait le Trièves à devenir une zone–dortoir de l’agglomération grenobloise.
– l’achèvement de l’A51 provoquerait une spéculation immobilière énorme au détriment des jeunes du pays qui ne peuvent déjà plus se loger dans les secteurs actuellement desservis par le barreau actuel.
– l’achèvement de l’A51 abîmerait fortement l’image du Trièves dont les principaux atouts sont le tourisme doux et l’agriculture de qualité.
- l’achèvement de l’A51 créerait un aspirateur à voitures et camions, un itinéraire bis de l’A7, arrivant sur un bassin Grenoblois déjà saturé, ce qui augmentera la pollution d’une zone urbaine déjà au-dessus des normes OMS une partie de l’année. Et cette pollution gagnera ensuite le Trièves comme tous les territoires environnants.
Il existe des solutions, plus logiques, moins coûteuses, plus sereines et fiables, moins destructrices de terres agricoles et répondant aux besoins locaux. Vous les connaissez :
– améliorer les nationales 1075 et 1085,
– moderniser la ligne ferroviaire Grenoble6Gap,
– exiger des Autorités Organisatrices de Transports du rabattement efficace des villages vers les gares,
– promouvoir sans faille l’éco mobilité…
Le Trièves ne peut être balafré par un projet dépassé tout en voyant son cadre magnifique utilisé en photo sur les cartes de voeux 2013 du conseil général de l’Isère dont le président, sans aucun mandat ni débat de son assemblée, prétend relancer ce projet inutile.
Il nous faut être des élus raisonnables, responsables, économes et efficaces. Vous avez eu raison de le rappeler à l’Assemblée nationale.
Monsieur le Ministre il faut entendre les enjeux énergétiques, climatiques et d’aménagement raisonné du territoire. Le Trièves a démarré sa transition énergétique vers un autre mode de fonctionnement, plus solidaire et convivial. Il est en avance sur l’orientation souhaitée par le gouvernement. Il ne faut donc pas poursuivre cette autoroute mais développer toutes les alternatives efficaces.
En vous remerciant pour votre attention, et restant à votre disposition pour tout échange ou visite de terrain que vous jugeriez utile, je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de ma haute considération.
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Corinne BERNARD Conseillère Régionale Rhône-Alpes |