Les langues régionales : témoins de la mémoire collective des rhônalpins

Belkacem Lounès

La région Rhône-Alpes est riche d’un patrimoine culturel matériel mais aussi immatériel. Les langues régionales rhonalpines, l’occitan et l’arpitan font partie de ce patrimoine immatériel. Belkacem Lounes, élu régional Région & Peuples Solidaires, apparenté EELV, président du comité de suivi des langues régionales, fait le bilan de l’action de la Région.

De quoi parle-t-on quand on parle des langues régionales de la région Rhône-Alpes ?

Il s’agit des langues historiques de notre région, l’occitan au sud de Rhône-Alpes (pratiqué principalement dans les départements de la Drôme et de l’Ardèche) et le francoprovençal ou arpitan au nord (pratiqué en Savoie, Ain, Lyonnais, une partie de l’Isère et de la Loire).

 Pourquoi s’intéresser aux langues régionales de Rhône-Alpes ?

C’est une question qu’on ne devrait pas se poser tant la légitimité des langues régionales est incontestable. L’occitan et le francoprovençal ou arpitan font partie du patrimoine immatériel de notre région. Ces langues sont les témoins de la mémoire collective des rhônalpins. Elles sont les langues-mères de la langue française.

Par ailleurs si l’on compte les locuteurs en occitan et en francoprovençal ainsi que ceux qui souhaiteraient apprendre à parler ces langues et ceux qui sont favorables à leur reconnaissance et à leur revitalisation, on serait entre 300.000 et un demi-million de personnes. Il y a donc une véritable demande sociale qui est en attente d’être entendue et satisfaite.

Enfin, les langues et cultures régionales de Rhône-Alpes font vivre la diversité, un peu comme les végétaux, les animaux, les paysages, les humains, font vivre la biodiversité. Les langues régionales sont donc au cœur de la problématique écologique et malheureusement peu de gens comprennent cela.

 Comment la Région a soutenu les langues régionales durant ce mandat ?

Notre Région a commencé par commander une étude en 2009 afin de faire un état des lieux. Cette étude dite « FORA », Francoprovençal et Occitan en Rhône-Apes, a débouché sur une délibération votée en juillet 2009, avec pour ambition de « reconnaitre, valoriser et promouvoir les langues régionales de Rhône-Alpes ». Cette délibération a prévu un Comité de suivi des langues régionales, comité que je préside depuis 2011.

Nous avons commencé par réunir tous les acteurs publics et privés en juin 2011, lors des premières assises des langues régionales de Rhône-Alpes, afin d’écouter toutes les parties prenantes et de tracer ensuite notre feuille de route. En interne, nous avons créé une ligne budgétaire spécifique « langues régionales » et son budget a été globalement multiplié par trois en 4 ans.

Côté occitan, la Région a adopté la charte de coopération interrégionale pour l’occitan (charte qui nous associe aux Régions de l’aire occitane), elle soutient un certain nombre d’actions telles que le Centre de documentation de l’occitan (Cirdoc), le Congrès permanent de la langue occitane, le festival occitan de Rodez, etc. De même, les soutiens aux acteurs associatifs occitans ont été renforcés.

Coté francoprovençal, la Région a adopté la charte interrégionale et transfrontalière pour le développement du francoprovençal (cette charte nous associe au Val d’Aoste en Italie et aux Cantons du Valais et de Fribourg en Suisse) et elle a augmenté le soutien qu’elle apporte au monde associatif.

Parallèlement, la Région est en discussion avec les Rectorats de Lyon et de Grenoble afin de parvenir à des conventions de concertation pour l’enseignement des langues régionales.

 Que reste-t-il à faire pour faire découvrir ce patrimoine culturel vivant aux rhônalpins ?

Nous avons pour ambition de conserver, transmettre, valoriser et socialiser nos langues régionales. Nous n’en sommes qu’au début de cette politique linguistique et les moyens dédiés à cette thématique restent très faibles même s’ils ont augmenté. Il faut continuer à renforcer les acteurs de terrain (les associations, les artistes, les enseignants et chercheurs…) et à inciter les autres collectivités territoriales à s’impliquer dans cette thématique (Départements concernés, communautés de communes, communes). Même les professionnels privés (de l’économie locale et du tourisme notamment) doivent être sollicités car les langues et cultures régionales constituent un facteur d’attractivité pour les territoires où elles sont en usage. Et d’une manière générale, les rhônalpins, grands et petits, gagneraient beaucoup à découvrir ou redécouvrir cette richesse d’une valeur inestimable de leur patrimoine.

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