Lyon-Turin : il faut décréter l’utilité publique pour le fret et les transports du quotidien

Le gouvernement a déclaré d’utilité publique la partie française du projet Lyon-Turin. Pour les écologistes, il y a urgence à rénover et reconstruire les lignes vers les Alpes du Nord, mais pas pour creuser un deuxième tunnel.

Pour les écologistes, toute la question repose sur la priorité donnée à ce projet. « Comme nous l’avons toujours dit, ce projet doit être un outil pour reporter le transport des marchandises de la route vers le rail tout en permettant de dé-saturer l’accès aux grandes villes de Rhône-Alpes pour les transports du quotidien, explique Jean-Charles Kohlhaas, conseiller régional et président de la commission transports. Il faut à la fois rénover l’existant et faire des voies nouvelles, comme entre Lyon et Chambéry. Mais vu l’évolution du trafic, il n’y a pas de priorité à construire un deuxième tunnel de 57 km. Pour remplir ces objectifs, le tunnel existant du Mont-Cenis est suffisant. »  

En effet, le tunnel actuel du Mont Cenis vient d’être rénové pour s’ouvrir au grand gabarit. Il n’est utilisé qu’au quart de sa capacité qui est de près de 20 millions de tonnes de marchandises par an.

« Le fret ferroviaire, en déclin, est pourtant l’une des voies de la transition écologique. Pour le stimuler, ce n’est pas simplement un tunnel qu’il faut, c’est de la volonté politique, estime Jean-Charles Kohlhaas.  Il faut mettre en place une éco-redevance sur le fret routier à un niveau conséquent, à l’instar de la Suisse. Elle permettrait de financer des infrastructures alternatives à la route, mais aussi d’assurer leur attractivité, en rétablissant la vérité des coûts du transport routier. »

Autre problème : une déclaration d’utilité publique ne vaut pas financement. Si l’Europe (donc ses membres) pourrait financer 40 % du seul tunnel de base, en revanche, la partie française en version TGV depuis Lyon est entièrement à la charge de l’État et des collectivités locales, soit plus de 11 milliards d’euros. La participation de la Région avoisinerait les 900 millions, ce qui représente plus de douze ans d’investissement sur les infrastructures de nos TER. Vu l’état des finances publiques, aucun financement n’est d’ailleurs acquis, comme l’a souligné la Cour des Comptes, dont les conclusions de l’an dernier se rapprochaient de celles des écologistes.

Notons aussi que la commission « Mobilités 21 » mise en place par le Premier ministre, avait conclu en juin dernier que « Si on ajoute les 300 à 400 millions d’euros annuels que capterait durant 10 ans la liaison ferroviaire à grande vitesse Lyon-Turin […], on ne pourrait donc pas engager de travaux supplémentaires avant l’horizon 2023, 2024 » et ce sur tout le reste du réseau ferroviaire français. « Ce rapport, validé par le Premier ministre, reportait donc le projet après 2030, note Jean-Charles Kohlhaas. Or, la durée d’une déclaration d’utilité publique est de dix ans. Donc, ces deux documents se contredisent. »

Pour les voyageurs, la priorité doit être aux lignes ferroviaires à haut niveau de service, permettant des circulations entre 200 et 240 km/h. De quoi satisfaire les besoins de 90% des usagers pour un investissement beaucoup moins important.  

« C’est donc avant tout une question de choix d’investissement : faut-il résoudre le nœud ferroviaire lyonnais, améliorer les liaisons vers les Alpes… Ou faire un tunnel qui ne sera probablement jamais rempli ? », conclut Jean-Charles Kohlhaas.

 

 

Remonter

UA-25684560-1