Intervention d’Alain CHABROLLE sur les Jeux Olympiques Annecy 2018

Alain Chabrolle

La Région Rhône-Alpes s’engage pour la réussite sportive et populaire des jeux, pour contribuer à façonner l’image de la montagne du 21ème siècle

Monsieur le Président,

Chèr-e-s Collègues,

Le modèle des Jeux Olympiques fut bouleversé par un évènement majeur, en 1976. En effet, cette année là, Montréal accueillait les Jeux d’été. Alors que les autorités municipales avaient estimé le coût des jeux à 124 millions de dollars, la ville de Montréal accumula une dette de 2,8 milliards de dollars, qu’elle mit trente ans à rembourser !

Aucune ville ne souhaitait se porter candidate à l’organisation des jeux de 1984. Après une recherche frénétique, Los Angeles accepte enfin. Mais le Comité d’Organisation des Jeux Olympiques refonda alors le modèle économique olympique : plus de financement privés, plus de sponsors, marchandisation des jeux, vers un sport spectacle où la marque a souvent plus d’importance que la technique.

Cela lança ensuite une nouvelle phase de concurrence frénétique entre les villes candidates à l’organisation des jeux, avec les effets désastreux que l’on a observé depuis de jeux en jeux, d’hiver ou d’été : endettements des autorités municipales et régionales, expropriation massive de population, monopolisation des fonds publics au détriment de politiques prioritaires, dans le domaine du logement ou du social par exemple.

L’environnement et l’aménagement des territoires ont particulièrement pâti de ces dérives de l’organisation des jeux olympiques. Et malgré les efforts louables de certaines candidatures, force est de constater que les objectifs vertueux qui ont pu être affichés -parfois plus de l’ordre du marketing vert- n’ont jamais globalement été atteints.

Pour Turin, après avoir déboisé un pan entier de montagne et déclassé un site du patrimoine italien, les équipements de Pragela sont maintenant à l’abandon. Tout le monde a aussi en mémoire le fiasco des transports en commun pour Turin, ou l’approvisionnement en neige par camions et hélicoptères pour Vancouver.

Ne parlons pas des futurs Jeux de Sotchi qui pourraient s’orienter vers une catastrophe écologique : rejets directs des eaux usées en Mer Noire, absence d’unités de traitement des déchets, population locale expropriée, milieux agricoles et naturels détruits. Triste bilan confirmé par un récent rapport d’une mission de l’ONU.

Dans ce contexte, notre groupe, notamment nos élus locaux, a été particulièrement à l’écoute des craintes et des exigences du monde agricole, des associations de protection de la nature et d’usagers, celles de très nombreux savoyards et rhônalpins.

C’est pourquoi nous avons eu à cœur de les faire partager par l’Exécutif et de les faire figurer dans cette délibération. A cet égard, je souligne l’attention portée à nos revendications et propositions.

Monsieur le Président, montrons dès maintenant notre volonté commune d’un aménagement exemplaire de nos montagnes.

De quoi s’agit-il précisément ?

Quelques exemples symboliques :

–          il s’agit que le Semnoz, site à très forte valeur symbolique pour les anneciens, espace naturel périurbain à haute valeur paysagère et d’intérêt biologique marqué, soit définitivement protégé, dans le cadre d’un ENS – Espace Naturel Sensible – qui précisera sa vocation agropastorale.

–          Il s’agit d’assurer la protection réglementaire de la Plaine du Fayet grâce à une ZAP -zone agricole protégée- c’est la dernière coupure d’urbanisation dans la vallée de l’Arve avec des enjeux paysagers et de corridor biologique majeur, mais d’abord zones agricoles plates irremplaçables.

–          Il s’agit de classer les Combes d’Aravis. Sachez que cette décision est attendue depuis plus de 20 ans. Les Combes constituent l’épine dorsale paysagère de Haute-Savoie, avec un patrimoine naturel tout à fait exceptionnel.

–          Il s’agit d’obtenir l’inscription du Massif du Mont Blanc au patrimoine mondial de l’Unesco. Ce massif emblématique le mérite bien.

–          Mais il s’agit aussi d’obtenir la remise en état des sites utilisés, comme le Semnoz, et la réutilisation maximale des nouveaux équipements.

–          Il s’agit aussi d’être exemplaire dans les domaines des transports en commun, de l’énergie, des filières d’approvisionnement (pour la construction, l’alimentation,…), exemplaire aussi pour les conditions de travail et la conduite des chantiers.

–          Il s’agit aussi des politiques nécessaires dans les PLU, les SCOT, les CDDRA, les éco-stations, la maîtrise du foncier, la gestion de la ressource en eau ou celle des risques.

–          Il s’agit aussi d’accompagner les changements culturels indispensables en aidant des projets associatifs par exemple dans les domaines du sport dans la ville, de nature et culture ou de l’éducation à l’environnement et à l’eco-citoyenneté

Ces exigences et ces ambitions constituent bien les conditions de la participation régionale.

J’insiste : Ces exigences constituent bien les conditions de la participation régionale.

Vous savez, Monsieur le Président, que notre groupe imagine d’autres types de grandes manifestations sportives et d’association de tous les citoyens du sport.

Citons un critère :

« Les Jeux Olympiques sont une expérience qui doit être bien vécue par tous les « clients » que ce soient les athlètes, les dirigeants, les médias, les partenaires, les spectateurs et les téléspectateurs… Tout ce qui est mis en œuvre soit l’être fait exclusivement avec cette ligne de conduite. »

Bon j’espère que vous n’avez pas imaginé un seul instant que cette citation fut de moi. Elle est d’un grand champion olympique français. Et vous comprendrez que nous ne partageons pas cette conception et sommes déterminés à continuer de contribuer au changement de celle-ci.

Pour notre groupe, cette délibération n’est qu’une première étape de vigilance. Soyez persuadé, monsieur le Président, que celle-ci sera permanente, forte et constructive.

Je conclurai en citant Andrew Zimbalist, un des plus grands économistes des Jeux Olympiques -extrait de Finances et développement de Mars 2010 : « les nombreuses villes candidates aux Jeux feraient bien d’éviter le battage olympique et d’analyser à froid les objectifs de développement à long terme de leurs régions. »

Monsieur le Président, je suis persuadé que vous partagez cette réflexion.

Merci

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